Saison catastrophique pour les commerçants

Par Jean-Philippe Morin
Le moratoire de cinq ans décrété par le gouvernement du Québec sur la pêche à la perchaude au lac Saint-Pierre s’est avéré catastrophique pour la pêche sur la glace, alors que des commerçants ont connu des pertes de l’ordre de 50% la dernière saison.
À la pourvoirie Paulhus, à Pierreville, le copropriétaire Mario Paulhus estime une perte de 50% de son chiffre d’affaires.
«C’est un peu à cause de la température, mais surtout en raison de la baisse de clientèle, estime M. Paulhus. Les familles n’étaient tout simplement pas au rendez-vous.»
Les gens ont tout de même loué quelques cabanes cet hiver, notamment pour pêcher le doré. Mais la clientèle principale n’y était pas au lac Saint-Pierre.
«Les pêcheurs de doré sont habitués, ils sont équipés. Les dorés sortent surtout très tôt le matin ou en début de soirée, alors ce n’est pas intéressant pour notre clientèle de jour», remarque le pourvoyeur.
Alors que les jours avancent, Mario Paulhus a de moins en moins d’espoir que le moratoire soit levé. Il reste maintenant quatre ans avant que ce calvaire se termine pour lui.
«Si le moratoire est maintenu l’an prochain, on n’ouvrira pas, admet-il humblement. On a passé beaucoup d’heures là-bas pour des revenus minimes, alors ça remet tout en question. On va continuer de vendre des appâts, mais on n’offrira plus de services sur la glace.»
M. Paulhus estime qu’environ une centaine de cabanes privées étaient installées sur le lac Saint-Pierre, comparativement à 225 par les années précédentes. Ses 26 cabanes qu’il louait à des clients n’ont que très peu servi.
Les pêcheurs en colère
À l’Association des chasseurs et pêcheurs de Sainte-Anne-de-Sorel, on dénonce également ce moratoire, qui a entraîné une baisse importante du membership cet hiver.
«Ça nous a donné un coup. C’est assez frustrant. L’an passé, on a eu une centaine de membres, alors qu’on a déjà été 300 dans nos bonnes années. Le plus malheureux, c’est pour les centres de pêche et les pourvoyeurs», explique la présidente de l’Association, Carole Descheneaux.
Du côté de l’Association des pêcheurs du lac Saint-Pierre, le président Jean Lévesque, n’est pas content de la situation.
«J’ai fait le tour des pourvoyeurs et dans le coin de Pierreville et de Baie-du-Febvre, c’est la catastrophe. Ce sont des baisses d’achalandage de 50%. En plus, la température n’a pas aidé. On a connu des coups d’eau importants et des redoux imprévisibles», constate-t-il.
Nouvelle étude
Des discussions avec le gouvernement du Québec sont présentement en cours afin qu’une nouvelle étude soit lancée concernant le nombre de perchaudes dans le lac Saint-Pierre. Selon des données préliminaires, il resterait suffisamment de perchaudes pour permettre la pêche sportive et commerciale.
Selon ce que le Journal a appris, le nombre de perchaudes dans le lac Saint-Pierre ne serait pas aussi critique que le ministère du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs (MDDEFP) le croit.
Jean Lévesque, qui est président de l’Association des pêcheurs du lac Saint-Pierre, souligne que les quelque 650 cormorans abattus l’été dernier y sont pour quelque chose.
«Au départ, leur alimentation était constituée de 15% de perchaudes. Or, selon les études, c’est plutôt 46%. Les chiffres ne mentent pas; on peut déjà mesurer l’effet de l’abattage des cormorans», plaide-t-il.
L’été dernier, M. Lévesque était accompagné d’une équipe de tournage de MAtv à Trois-Rivières. Pendant deux heures, il a pêché la perchaude.
«Je voulais démontrer qu’il reste en masse de perchaudes. J’en ai attrapé environ 200. Nous, les pêcheurs, on le sait où il y en a, de la perchaude! Les pêcheurs de doré ne cessaient de me dire qu’ils n’attrapaient que de la perchaude qu’ils devaient jeter à l’eau», scande-t-il.
Les données officielles seront connues lors de l’assemblée générale annuelle de l’Association des pêcheurs du lac Saint-Pierre en avril prochain.