La hausse du calibre fait exploser les salaires
Le Blizzard de Saint-Gabriel-de-Brandon et le Pavage 132 de Nicolet ont croisé le fer, vendredi dernier. Les deux formations sont aux antipodes en ce qui a trait aux revenus financiers.
Le vieil aréna Jean-Guy-Talbot accueillera les Barons jusqu'à ce qu'il soit détruit à la faveur du nouveau Colisée. Les propriétaires de l’équipe ne savent pas où ils pourront évoluer par la suite.
Plusieurs joueurs de qualité se sont ajoutés à la ligue dans les dernières années, dont Nicolas Désilets, un ancien des Catarates de Shawinigan et des Patriotes de l'UQTR.
Pour les propriétaires des Barons du Cap-de-la-Madeleine, Michel Aubry, Annie Boisvert et Éric Chevalier, il est maintenant difficile de rester à flot. « Il faut être fou pour faire du hockey senior », lance Mme Boisvert.

Par Nicolas Ducharme
À sa neuvième saison d’existence, la Ligue de hockey senior A de la Mauricie connaît ses meilleurs moments. Les arénas débordent dans plusieurs villes et le calibre de jeu n’a jamais été aussi élevé. Mais certaines équipes commencent à s’inquiéter de cette progression fulgurante.
La recette des rivalités régionales continue de faire effet dans le circuit Beauchamp. Des foules dépassant les 900 personnes ont été enregistrées aux quatre coins de la ligue. On s’attend même à franchir le cap des 1600 spectateurs lors du prochain affrontement entre le Bellemare de Louiseville et le Blizzard de Saint-Gabriel-de-Brandon. Les Mauriciens ont adopté le hockey à 5 $, si bien que plusieurs formations de la ligue n’ont plus rien à envier au Caron et Guay de la LNAH.
Cette saison, la LHSAM a pris un tournant, en éliminant le principe des territoires. Ainsi, chaque équipe dispose d’une liste de 50 joueurs établie en début de saison et n’est plus forcée de faire appel à des joueurs de sa région environnante. Cette modification a grandement changé le paysage de la ligue, puisque quelques formations ne comptent presque plus de joueurs locaux. Certaines organisations, comme le Bellemare et le Bigfoot de Saint-Léonard-d’Aston en ont profité pour faire le plein de hockeyeur talentueux, ce qui parait au classement. Ces deux équipes, ainsi que le Blizzard, dominent le classement de la LHSAM.
Les dollars se font aller
Ce nouveau règlement a toutefois entraîné une hausse majeure dans les salaires des joueurs. Par le passé, les dirigeants de la LHSAM de la Mauricie ont toujours affirmé que les hockeyeurs n’étaient pas rémunérés. C’était toutefois un secret de Polichinelle que certains, majoritairement des bagarreurs, touchaient quelques dollars au terme des matchs. Mais cette saison, plus de cachettes.
« Chaque équipe gère sa business. On ne se met pas le nez là-dedans si les équipes payent les joueurs ou non. Le but est d’avoir du bon hockey et qu’administrativement, à la fin de l’année, toutes les équipes fassent leurs frais », mentionne le président du circuit, Alain Beauchamp.
Mais voilà que certaines organisations crient famine. Les Entreprises A.M. de Saint-Tite ont bien failli ne pas amorcer la saison, alors que les Barons du Cap-de-la-Madeleine peinent à rivaliser monétairement avec les autres.
Même à Nicolet, où le Pavage 132 jouit d’un bon appui de ses commanditaires, les temps se font durs.
« Ce qui va arriver, c’est que les équipes qui ont 300 à 400 spectateurs ne pourront plus suivre, alors que ceux qui ont des foules de 600 ou 700 personnes, oui. Nous sommes rendus à un endroit où tout est une question de budget. Cette méthode marche un certain temps, mais un moment donné, elle tombe », déplore Sylvain Desgranges, un des administrateurs de l’équipe.
« Les assistances sont là, mais je doute de la survie de quelques équipes, incluant la nôtre. »
Des salaires de la LNAH
Selon ce que nous avons appris, certains joueurs toucheraient jusqu’à 400 $ par match, le tout pour une saison de 22 rencontres. Par le passé, les bagarreurs étaient presque seuls à gagner un salaire. Plus maintenant !
Le succès que connaît la LHSAM n’est pas sans rappeler celui que connaissait la Ligue de hockey semi-professionnelle du Québec au milieu des années 90. Depuis, ce circuit a pris de l’ampleur, si bien qu’une seule de ses 13 concessions a survécu et évolue aujourd’hui dans la LNAH, Thetford Mines. Le même sort attend-il la LHSAM ?
Stopper la croissance du calibre
Si la LHSAM tient à garder ses huit équipes en vie, elle devra trouver un moyen de restreindre l’augmentation du calibre de jeu. Le principe des joueurs locaux pourrait d’ailleurs effectuer un retour dans l’année prochaine.
« Le calibre a augmenté, mais on ne veut pas qu’il augmente plus, laisse savoir le président du circuit, Alain Beauchamp. Nous avons mis les territoires de côté, mais il faudra peut-être penser à instaurer un quota de joueurs locaux. »
Les petits marchés ne demanderaient pas mieux. « J’aimerais voir une limite de joueurs de l’extérieur. Comme ça, il n’y aurait plus de triche comme par le passé », souligne Sylvain Desgranges, du Pavage 132 de Nicolet.
Pour d’autres, on aimerait qu’une bonne partie de l’équipe soit composé de joueurs locaux. « La moitié de notre club, ce sont des gars des environs. Des clubs comme Louiseville, il n’y a personne du coin. Même leurs partisans disent que c’est le fun de gagner, mais qu’ils ne connaissent pas un seul joueur. C’est trouver le juste milieu qui n’est pas facile », mentionne Michel Aubry, copropriétaire des Barons du Cap-de-la-Madeleine.
« Ce n’est pas normal qu’il y ait des joueurs de Montréal dans la ligue », ajoute son directeur général, Patrick Lacelle.
Le défi trifluvien
Étonnamment, c’est dans son plus grand marché que la LHSAM connaît beaucoup de difficultés. Ayant leurs pénates au vieil aréna Jean-Guy Talbot, les Barons attirent en moyenne 475 spectateurs par match, bien en deçà des concessions de Louiseville et Saint-Gabriel-de-Brandon
Selon les propriétaires de l’équipe, le marché du hockey de la Cité de Laviolette est saturé, et il est difficile pour la LHSAM d’y prendre son envol.
« Pour avoir du succès, il faut être en campagne. À Trois-Rivières, nous devons nous battre contre les Estacades, les Patriotes, le Caron et Guay et le Collège Laflèche. Et on ne parle ici que de hockey », affirme Éric Chevalier.
La recherche de partenaires financiers s’avère aussi plus difficile. « Ici, on ne peut pas avoir un gros commanditaire pour notre nom. Et pourtant, j’en ai fait une job à temps plein », ajoute Annie Boisvert.
Les trois propriétaires se montrent sceptiques quant aux rumeurs d’expansions du circuit, qui verrait l’apparition d’équipes dans la région de Lanaudière et à Saint-Cyrille-de-Wendover. Ils préfèreraient plutôt qu’on tente de solidifier les marchés déjà existants.
La bonne nouvelle est que la LHSAM partage ce point de vue. « Je vois beaucoup de belles choses qui s’en viennent pour la ligue. Le but n’est pas d’être le plus grand circuit ou le plus fort. L’objectif premier est que nos huit équipes soient heureuses », précise M. Beauchamp.
Pour partager votre opinion vous devez être connecté.