Une saison à l’eau pour les marinas

Par Nicolas Ducharme
L’absence de pluie au Québec a fait le plaisir à bien des vacanciers cet été. Le son de cloche est bien différent chez les pas aux propriétaires de marinas de la région. Pour certains, ce sont des pertes avoisinants les 50 % qui ont été enregistrées cet été.
Avec un hiver sans neige, les plaisanciers espéraient que les précipitations seraient au rendez-vous afin d’augmenter le niveau des cours d’eau. Ce fut totalement le contraire, et plusieurs marinas en ont souffert.
Du côté de Nicolet, le Club nautique de la Batture semble avoir été l’un des plus durement touchés dans la région. La marina, installée dans l’embouchure de la rivière Nicolet, a été inaccessible aux bateaux pendant plusieurs jours de l’été. Certains plaisanciers ont dû se résigner à abandonner leur embarcation, incapables de rejoindre le fleuve Saint-Laurent, qui est pourtant situé à seulement quelques centaines de mètres. Pour d’autres, c’est par les moyens les plus incroyables qu’ils sont parvenus à se sortir du bourbier.
« Une journée, j’ai dû enlever mes souliers et aller pousser à pied quatre bateaux, dont le mien », explique le commodore de l’endroit, François Caron.
Ce dernier ne se souvient pas d’une année aussi catastrophique que l’été 2012. « C’est la première fois que je vois ça. Mon père a 82 ans et parcourt le site depuis longtemps. Il n’a jamais vu une situation si mauvaise. »
Bien évidemment, l’inaccessibilité du site pour les bateaux a grandement nui aux affaires, le club nautique possédant un resto-bar avec une terrasse. M. Caron estime que le chiffre d’affaires de l’organisme sans but lucratif a chuté de 30 %.
Certains s’en tirent, d’autres non
Il n’y a pas que du côté de Nicolet où le manque de précipitations a joué un vilain tour aux propriétaires de marinas. De l’autre côté du fleuve, le Camping et Marina Louiseville a dû restreindre l’accès à l’eau pendant une partie de l’été, le niveau dans la rivière du Loup n’étant pas suffisant pour permettre d’accéder au lac Saint-Pierre.
D’autres ont pu en profiter, comme à la Marina Le nid d’aigle, aussi située à Louiseville.
« J’étais le seul dans toute la région où on pouvait descendre un bateau. Notre bassin a été creusé en 1985 et il faut croire qu’il a été bien fait », explique Raynald Codey.
Du côté de Trois-Rivières, la marina située à l’Île Saint-Quentin s’en est aussi tirée. Son emplacement donnant directement sur le fleuve Saint-Laurent lui a permis de rester ouverte sans être grandement victime de l’absence de précipitations.
Pour ce qui est de la Marina Sainte-Angèle-de-Laval, le malheur s’était déjà abattu sur l’endroit avant même que Dame Nature s’en mêle. Le resto-bar de l’endroit a été la proie des flammes au mois de juillet. Le propriétaire, Éric Thibodeau, croit qu’il aurait, lui aussi, subi d’importantes pertes si l’incendie n’avait pas eu lieu.
« Si j’avais été ouvert, j’aurais été très embêté. J’aurais perdu 50 % de ma clientèle, peut-être plus. Le manque de pluie a été catastrophique et le niveau d’eau était tellement bas que les gens évitaient de venir. »
Peu de solutions envisageables
Alors qu’elle vient tout juste de connaître une saison des plus difficiles, le Club nautique de la Batture possède bien peu de moyens pour améliorer son sort. Dans le meilleur des mondes, un hiver fortement enneigé permettrait de renflouer les rivières et régler la majorité des problèmes qu’ont connus les plaisanciers cet été.
« Il faudrait aussi que les glaces se retirent par eux-mêmes, plutôt que d’être brisée par un aéroglisseur. Ça permettrait de gratter le fond et de créer une ouverture naturelle », explique Audrey Rousseau, employée au Club nautique de la Batture.
Malgré un retrait naturel, il se peut que ce ne soit pas suffisant pour permettre à la marina située à Nicolet de souffler. Déjà, certains projets sont en branle, mais les coûts et les délais jouent contre elle.
« La solution facile serait de draguer la rivière, mais ça coûterait des millions $. Mais avant, il faudrait tout d’abord que des réparations soient effectuées au mur de protection à l’entrée de la rivière. Il a été installé par le gouvernement fédéral il y a longtemps. Mais personne ne veut toucher à ça », mentionne le commodore du Club nautique de la Batture, François Caron.
Selon ce dernier, ce mur empêche les sédiments de quitter la rivière Nicolet pour se diriger vers le fleuve. Le commodore a d’ailleurs constaté que le cours d’eau avait perdu de sa profondeur cette année.
Droit d’entretient
Le Club nautique de la Batture est donc à la recherche d’une solution de rechange, puisque draguer le lit de la rivière n’est financièrement pas viable. L’organisme aimerait donc obtenir un droit d’entretien du cours d’eau. Déjà, un de ses membres a entrepris des démarches avec les ministères des Travaux publics du Canada et des Ressources naturelles du Québec.
« Nous pourrions ainsi fabriquer une herse et l’accrocher à un bateau d’une certaine puissance afin d’aplanir le fond, qui est présentement en forme de vagues. Selon moi, nous pourrions gagner deux pieds. Nous pourrions donc entretenir la rivière tout en respectant les normes environnementales », observe M. Caron.
D’ici là, si d’autres étés avec peu de précipitations devaient survenir, la marina continuerait de perdre des visiteurs, et peut-être même des membres.
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