Jean Tremblay met le feu aux poudres
Par L'Écho
Le maire de Saguenay, Jean Tremblay, a tenu mercredi matin des propos xénophobes à l’encontre de Djemila Benhabib, la candidate du PQ dans Trois-Rivières. Il a dit se méfier d’une personne qui « arrive d’Algérie ».
Le maire Tremblay, qui se bat notamment pour que la prière soit maintenue avant chaque conseil municipal, n’a pas mâché ses mots au lendemain de l’annonce par Pauline Marois de la création d’une charte de la laïcité au Québec en cas d’élection du PQ.
Elle avait à ses côtés Mme Benhabib, une intellectuelle qui se bat contre l’intégrisme musulman et milite depuis plusieurs années en faveur de la laïcité. Elle a notamment publié « Ma vie à contre-Coran » et « Les soldats d’Allah à l’assaut de l’Occident ». Cette dernière souhaite voir disparaître les signes religieux et les lieux de prières des institutions publiques et parapubliques.
« Nous les mous, les Canadiens français, on va se faire dicter comment se comporter, comment respecter notre culture par une personne qui arrive d’Algérie. On n’est même pas capable de prononcer son nom », a affirmé Jean Tremblay, mercredi matin sur les ondes du 98.5 FM.
Djemila Benhabib s’est notamment prononcée par le passé en faveur du retrait du crucifix à l’Assemblée nationale. Mardi, un journaliste l’avait interpellée à ce sujet, étant donné que le PQ refuse que l’on enlève ce crucifix historique. Mme Benhabib avait alors précisé qu’il s’agissait d’une position qu’elle avait prise en tant qu’intellectuelle et qu’elle se rangeait désormais derrière la ligne de son parti.
Mais M.Tremblay ne l’a pas entendu pas de cette oreille et se montre méprisant à l’égard de la candidate péquiste. « Je n’aime pas que ces gens-là (sous-entendu les immigrants) arrivent ici pis établissent leurs règles. Qu’on aille toucher à leurs règles pour le fun… »
« Ils vont faire disparaître la religion et notre culture de partout », a également déclaré le maire de Saguenay, qui dit aimer les immigrants, « mais en autant qu’ils se marient à notre culture. »
« Je ne souhaite pas répondre au maire Tremblay et je ne veux pas que le débat se cristallise sur ma petite personne », s’est contentée de commenter Djemila Benhabib un peu plus tard mercredi matin lors d’une conférence de presse dans sa circonscription de Trois-Rivières.
« C’est anecdotique, ne nous arrêtons pas à l’anecdotique, a-t-elle intimé, visiblement ému, dans l’après-midi à TVA Nouvelles. J’ai une expertise sur la laïcité, je veux débattre de cette question là, mais dans la sérénité et l’harmonie, et en évitant les dérapages. »
Réactions
La chef du PQ, Pauline Marois, a de son côté réclamé des excuses du maire de Saguenay.
« Il démontre qu’il a une complète méconnaissance du cheminement de Djemila Benhabib, qui est exemplaire quant à son intégration à la société québécoise, a-t-elle dit. Je crois que ce sont des propos complètement inacceptables et irresponsables. Il devrait s’en excuser. »
« C’est enfantin de demander des excuses, a rétorqué Jean Tremblay lors d’une entrevue à TVA Nouvelles dans laquelle il a réaffirmé ses propos. Non, je ne m’excuserai pas. »
Québec solidaire s’est fendu mercredi après-midi d’un nouveau communiqué pour condamner les « propos xénophobes » de Jean Tremblay.
Yves Lévesque
Sans approuver la forme, le maire de Trois-Rivières, Yves Lévesque, a apporté son soutien sur le fond à son collègue de Saguenay au 98,5 FM, en affirmant que « c’est ce que la majorité des gens pensent de façon silencieuse ».
M. Lévesque a toutefois souligné qu’il ne faut pas stigmatiser les immigrants, puisque, si la minorité a souvent gain de cause selon lui, « c’est souvent des gens de chez nous » dont il est question. Il a notamment pris pour exemple la citoyenne québécoise « pure souche » qui était parvenue à abolir la tradition de la prière au conseil municipal de Trois-Rivières.
« Voilà du racisme qui n'a pas sa place dans le débat public, a dit la co-porte-parole de QS Françoise David. Il est temps que M. Tremblay arrive au 21e siècle. »
Du côté du Parti libéral, invitée à réagir aux affirmations du maire de Saguenay, la ministre de la Culture, Christine St-Pierre, a esquivé les questions pour se concentrer sur une critique en règle du projet de charte de la laïcité de Pauline Marois. La candidate dans la circonscription de l’Acadie a dit ne pas vouloir diviser les Québécois, estimant que la Charte des droits et libertés se suffisait à elle-même.
Lui aussi appelé à donner son opinion sur la controverse du jour, le chef de la CAQ, François Legault, a rendu le premier ministre responsable des dérives sur le sujet.
« M. Charest, en voulant mettre le dossier des accommodements raisonnables en dessous de la table, a créé ce genre de réactions lui-même », a affirmé M. Legault.
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