Médecin de famille à échanger

Par Mathieu Duquette
René St-Onge est natif de Shawinigan, il a fait carrière dans la région de l’Outaouais. Il y a un peu plus de deux ans, il est rentré dans son patelin. Il habite aujourd’hui Notre-Dame-du-Mont-Carmel. Après tout ce temps, mais non sans efforts, M. St-Onge est toujours incapable de trouver un médecin de famille de la région qui voudra bien le prendre comme patient.
Devant cette impasse, l’homme de 60 ans a trouvé un moyen pour le moins inusité dans le but de trouver une solution à son problème. Vendredi dernier, il a publié une annonce sur le site de petites annonces sur le web <I>kijiji<I>.
Dans cette annonce, M. St-Onge offre les services du médecin de famille qui lui a prodigué des soins durant toutes ses années passées en Outaouais en échange des services d’un médecin de famille œuvrant ici, en Mauricie.
L’annonce dit ceci : «Je suis déménagé en Mauricie il y a plus de deux ans et je suis toujours à la recherche d’un médecin de famille. J’ai présentement un médecin de famille en Outaouais et je voudrais prendre entente avec une personne qui habite la région de l’Outaouais et qui possède un médecin de famille en Mauricie. À la suite des ententes avec nos médecins respectifs, nous pourrions peut-être faire un échange de médecins de famille. Donc, si vous possédez un médecin de famille en Mauricie et que vous voudriez en avoir un en Outaouais, prière de communiquer avec moi par courriel. »
Rien à perdre
À court de recours, M. St-Onge a jugé qu’il n’avait rien à perdre en procédant ainsi.
« J’ai vraiment fait le tour, explique M. St-Onge. Que ce soit à Shawinigan, Trois-Rivières où ailleurs, je me suis rendu jusqu’à Victoriaville et aucun médecin de famille ne peut me suivre. Vous êtes par ailleurs le premier à répondre à l’annonce. »
Le portrait de la médecine familiale au Québec n’est plus à faire. Peu importe la région, il est très difficile pour quiconque de dénicher un tel spécialiste qui accueille de nouveaux patients.
« Pour l’instant, je garde ma place auprès de mon médecin en Outaouais, poursuit M. St-Onge. Je lui ai d’ailleurs demandé dans le passé s’il pouvait me recommander quelqu’un dans le coin, mais en vain. Lorsque le médecin de mon épouse s’est retiré de la profession, j’ai tenté de convaincre mon médecin de la prendre comme patiente et il n’a même pas voulu. »
Prévenir plutôt que guérir
Le sexagénaire n’a pas de graves problèmes de santé. Il souhaite seulement pouvoir être vu annuellement par un médecin et qu’un suivi soit possible s’il tombe malade.
« Moi je veux seulement prévenir, ajoute-t-il. Pour voir un médecin maintenant, il faut être vraiment très malade. Il y a toujours le privé où l’on peut être examiné pour environ 200 $, mais ils ne font pas de suivi. »
C’est jeudi qu’il présentera son idée à son médecin en Outaouais.
« Je vais essayer de m’entendre avec lui. Je ne crois pas qu’il y aura de problème. Je ne veux que céder ma place à quelqu’un. »
Admissible ?
Selon le Dr Pierre Martin, président de l’Association des médecins omnipraticiens de la Mauricie, une telle pratique pourrait effectivement avoir lieu.
« Rien n’interdit aux médecins de famille concernés d’accepter. Les médecins peuvent y voir là un geste de débrouillardise et obtempérer. Cependant, un médecin n’est pas un bien qui t’appartient », a expliqué Dr Martin.
Dans l’éventualité où M. St-Onge trouvait un échange satisfaisant, les médecins pourraient donc refuser et décider de s'en tenir au guichet d'accès pour clientèle orpheline et respecter la liste d'attente mise en place par les CSSS des régions respectives.
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