172 000 $ de dépenses non conformes, selon Québec

Par Guillaume Jacob
De 2008 à 2010, les conseillers municipaux de Trois-Rivières ont effectué 172 000 $ de dépenses jugées « non conformes » par le ministère des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire (MAMROT). Le conseil municipal et l’administration se sont dressés en bloc contre ces affirmations.
Après une vaste enquête lancée en août 2011, le MAMROT a rendu publics vendredi les résultats de ses vérifications auprès de toutes les villes de plus de 50 000 habitants, qui doivent allouer un budget de « recherche et secrétariat » à leurs élus.
Le ministère conclut que « la Ville de Trois-Rivières présente des lacunes quant au respect des dispositions législatives prévues dans la Loi sur les cités et ville pour les dépenses de recherche et de secrétariat des conseillers pendant la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010 ».
Au cours de ces trois années, plus de la moitié des dépenses remboursées par la Ville ne serait « pas conforme » aux dispositions de la loi, selon le MAMROT. Cela représente 172 611 $. En fait, le rapport du ministère statue que seulement 4,2 % des montants remboursés aux conseillers entre 2008 et 2011 sont conformes. Pour le reste (42,5%), « à la lumière des pièces justificatives analysées et de l’information fournie par la Ville, le Ministère n’a pu statuer sur la conformité de ces dépenses ».
Tous les ans, chaque conseiller municipal a droit à 9000 $ de dépenses de recherche et secrétariat.
Les conseillers et l’administration outrés
L’ensemble des conseillers ainsi que l’administration municipale se sont levés en bloc contre le rapport du MAMROT. « Consternation et stupéfaction sont les sentiments unanimes partagés par les élus et les hauts fonctionnaires », a déclaré, au nom de tous ses collègues, le conseiller René Goyette lors d’un point de presse.
C’est que la Ville de Trois-Rivières est dotée, depuis la fusion en 2002, d’un cadre de référence adopté lors de la deuxième séance du conseil de la nouvelle ville, et « rigoureusement appliqué » pour le remboursement des dépenses des élus, disent de concert conseillers et fonctionnaires.
Or, le cadre de référence en question détaille plutôt précisément les dépenses admissibles, renchérit la directrice des finances de la Ville, France Cinq-Mars. « On y spécifie en quoi consistent les dépenses de recherche et secrétariat item par item. On a fait des catégories pour les fournitures de bureau, les frais postaux et de distribution des bulletins de quartier, la location de locaux, la construction d’un site web, etc. Il y a aussi des maximums indiqués pour certains items. »
La précision du cadre de référence trifluvien fait gage de sa rigueur, ajoute Mme Cinq-Mars. « Je trouve drôle que dans ses rapports de vérification, le ministère se soit donnée comme prémisse de s’en tenir au sens courant des termes "recherche et secrétariat ", vu qu’il n’y avait pas de définition dans la loi. »
Le ministère n’aurait pas tenu compte du règlement trifluvien et se serait fié uniquement à l’avis préparé par sa Direction des affaires juridique.
« Je suis solidaire des membres du conseil qui tombent des nues, a pour sa part insisté le greffier de la Ville, Me Gilles Poulin. Nous avons fait l’effort d’encadrer ce qui, à l’époque, ne l’était pas par le ministère. Je trouve ça assez dégueulasse que l’on vienne nous éclabousser, alors que le vrai scandale n’est pas ici », a-t-il déploré.
À ce titre, le greffier a notamment fait allusion aux dépenses farfelues du maire de Laval, qui avait utilisé les fonds de recherche et secrétariat pour inviter des militants de son parti à la cabane à sucre.
Le directeur général, Michel Byette, a quant à lui déploré que la Ville n’avait jamais eu l’avis légal qui sous-tendait l’enquête du vérificateur du ministère.
Le greffier, Gilles Poulin, s’est dit surpris par l’approche du ministère. « Le MAMROT est en train de s’ériger en tribunal, en tentant de décider ce qui est correct et ce qui ne l’est pas. Si vraiment le ministère croit que les élus qui m’entourent ont erré, qu’il dépose des accusations devant les tribunaux et nous verrons à nous défendre. »
Le ministre réagit
Sitôt les rapports de vérification concernant les différentes villes déposés, le ministre des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire, Laurent Lessard, a eu tôt fait de réagir. Par voie de communiqué, il a admis qu’il existait « d’importants écarts d’interprétation des règles actuelles ».
Le ministre a annoncé « son intention de proposer à l'Assemblée nationale de modifier la Loi sur les cités et villes afin que les règles entourant l'utilisation des sommes destinées à la recherche et au secrétariat des conseillers municipaux soient mieux encadrées ».
L’Union des municipalités du Québec a aussi réagi. Elle insiste sur la nécessité de clarifier la loi.
Quelques points du cadre de référence de la Ville de Trois-Rivières :
-Tout bien de plus de 250 $ acheté par un conseiller et remboursé par la Ville demeure la propriété de la Ville
-L’élu doit lier chaque réclamation à un article du cadre de référence
-Les élus ont droit à 9000$ par année. En moyenne, ils utilisent 80% de cette somme, bon an mal an.
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