Quand la cabane à sucre fait dans le bio

Par Nicolas Ducharme
Ses clients sont Montréalais, Chinois et Européens. Sa nourriture a un goût différent. Qu’est-ce qui fait le succès de la cabane à sucre de la ferme Le Crépuscule ? Elle est l’une des seules à être certifiée bio au Québec.
Situé en pleine campagne à Yamachiche, le site a bien peu à voir avec les « salles de réception sucrées », où s’entassent des milliers de personnes chaque printemps. L’endroit peut accueillir une soixantaine de personnes chaque jour, suffisamment pour atteindre la rentabilité. De toute façon, son propriétaire, Jean-Pierre Clavet, n’a jamais fait ce boulot pour l’argent. Éternel romantique, c’est à la vieille méthode qu’il travaille depuis qu’il a fait l’acquisition de la ferme en 1990. Pas qu’il tente d’impressionner la clientèle, mais il trouve que cette façon de travailler s’est perdue.
L’eau d’érable, ce n’est pas à l’aide de tubes qu’elle est recueillie, mais à la main à l’aide du fidèle cheval Pinotte. « Je suis le seul fou qui fait ça dans le coin! », lance-t-il.
Quant à la nourriture, elle est cuite sur un four à bois ancestral. « Ça impressionne les jeunes, qui n’ont jamais vu des fours de ce type », souligne M. Clavet.
De la nourriture faite sur place
Au-delà du décor ancestral, ce qui attire la majorité des clients à la cabane Le Crépuscule, c’est la certification bio de l’entreprise.
« Ma clientèle vient très peu de la région. C’est souvent des gens de Montréal. Beaucoup sont originaires d’autres pays, dont la France. Une bonne partie me trouve par le biais d’internet parce qu’ils cherchent une cabane bio. Ils veulent vivre une expérience bio et gastronomique », indique-t-il.
Selon lui, à peine 2% de la population est sensibilisée à la cuisine bio.
L’acériculteur de 56 ans avoue même que les Mauriciens représentent un très faible pourcentage de sa clientèle. Le prix du couvert, 41 $, a aussi un rôle à jouer.
« J’entends souvent des commentaires comme quoi des bines, c’est des bines. Mais ici, c’est plus que ça. Si les gens cherchent une cabane à sucre bon marché, ils ne sont pas au bon endroit. »
Un phénomène montréalais ?
Si la cabane à sucre Le Crépuscule est à peine connue dans la région, elle a fait sa marque dans la métropole. Ses produits se sont retrouvés dans des restaurants comme Toqué de Normand Laprise et ont été utilisés par des chefs comme Daniel Pinard et Jean Soulard. Pourquoi ne pas miser sur cette publicité afin d’accentuer la popularité de l’entreprise?
« Je veux atteindre les familles. Je ne veux pas faire de la cuisine de masse. Je ne veux pas vendre au Costco. Lorsque nous avons une foule monstre, les gens ne sont pas contents parce que l’ambiance n’est pas la même. C’est un couteau à deux tranchants », conclut celui qui compte sur deux employés ainsi que sa conjointe Debbie.
Obtenir la certification bio n’est pas une mince affaire. Pourtant, cette homologation est essentielle au succès de la cabane à sucre de la ferme Le Crépuscule.
Certification bio: de multiples conditions à respecter
N’y-a-t-il rien de plus en symbiose avec la nature qu’une cabane à sucre ? Pourtant, la liste de conditions à respecter afin d’obtenir la certification du Conseil des appellations réservées et des termes valorisants s’étend sur plus d’une demi-douzaine de pages. Le tout va des produits à utiliser pour nettoyer l’évaporateur jusqu’aux éléments à employer lors de la cuisson. Une longue liste à laquelle Jean-Pierre Clavet doit se conformer, sans quoi sa certification sera révoquée. Ce dernier estime qu’il lui en coûte 1000 $ par année pour obtenir cette attestation.
« S’il y a une problématique, il peut y avoir des inspections surprises. Celles-ci sont à mes frais », explique-t-il.
Un menu local
Afin de s’assurer que le menu qu’il offre à ses clients est bio, M. Clavet élève des bêtes sur sa propre ferme. Son troupeau de bœuf est utilisé pour faire de la saucisse, entre autre. Avec sa volaille, il crée son bacon de poulet, une exclusivité de la cabane. Quant à ses poules pondeuses, les œufs sont utilisés à profusion dans les omelettes et les œufs dans le sirop.
Une bonne partie des légumes utilisés poussent aussi sur la terre. Quant au porc, requis pour plusieurs de ses recettes, c’est à Sainte-Monique-de-Nicolet que le producteur s’approvisionne, dans une ferme qui est elle aussi bio.
Quant aux autres ingrédients, M. Clavet s’assure que ceux-ci ont reçu la certification bio, allant des fèves jusqu’au thé.
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