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La Première Nation Gitga'at rencontre un ministre albertain au sujet des pétroliers

durée 19h52
8 décembre 2025
La Presse Canadienne, 2025
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4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2025

Dans les années 1970, Cameron Hill avait six ou sept ans lorsqu'il a participé avec son père, à bord d'une barque en bois, à un barrage maritime visant à bloquer le passage d'un navire transportant des dirigeants pétroliers. Ces derniers cherchaient un passage pour leurs pétroliers à travers le territoire de la Première Nation Gitga'at, sur la côte nord de la Colombie-Britannique.

Cinquante ans plus tard, en tant que chef adjoint de la Première Nation, M. Hill réaffirme son engagement à protéger les eaux dont dépend la nation, alors que les discussions reprennent concernant un possible oléoduc dans le nord et le passage de pétroliers sur leurs eaux.

M. Hill faisait partie d'un groupe de dirigeants de la Première Nation Gitga'at qui ont rencontré vendredi le ministre des Relations avec les Autochtones de l'Alberta, Rajan Sawhney. Il a qualifié cette rencontre d'«ouverte et franche», les dirigeants ayant exprimé leur opposition à toute modification de l'interdiction canadienne des pétroliers pour desservir le potentiel oléoduc.

«Je pensais que c'était terminé, et voilà que ça recommence. Alors, je suppose que je ne dois jamais baisser ma garde, a-t-il dit. Parce que ce qui nous a été légué depuis des milliers de générations, c'est de veiller à ce que ce que nous offrons à nos générations futures soit aussi bon que ce que nous avons reçu, et c'est ce que nous nous efforçons de faire.»

«Je ne comprends pas pourquoi les gouvernements et les promoteurs ne le saisissent pas», a-t-il rajouté.

L'Alberta et le gouvernement fédéral ont signé le mois dernier un protocole d'entente sur les mesures à prendre si une entreprise privée est choisie pour construire un oléoduc vers la côte nord-ouest, y compris, «si nécessaire», un ajustement de l'interdiction de la circulation des pétroliers par Ottawa.

Déroulement de la rencontre

La rencontre avec M. Sawhney a eu lieu par Zoom après que deux tentatives de visite dans la communauté côtière de Hartley Bay aient été annulées en raison du mauvais temps, mais la ministre a déclaré qu'il était important d'établir ces liens.

«L'idée est donc, tout d'abord, de me présenter, de présenter le gouvernement de l'Alberta, de parler d'un projet potentiel, d'écouter attentivement leurs préoccupations et de pouvoir les transmettre à notre équipe de conseillers techniques», a-t-il expliqué.

Les Gitga'at ont écrit dans un communiqué avoir présenté à M. Sawhney des preuves scientifiques et historiques confirmant qu'il n'existe aucune preuve de leur implication dans la construction d'un oléoduc vers la côte nord-ouest qui, selon la municipalité, connaît certaines des plus fortes amplitudes de marée au monde.

«Nous avons soulevé la question de la récupération du bitume dans nos eaux en cas de déversement et expliqué que, tant que cette question n'aura pas reçu de réponse crédible, nous continuerons d'assumer notre responsabilité de protéger les écosystèmes marins qui ont soutenu notre culture, notre économie et notre mode de vie pendant 14 000 ans», a soutenu le chef du conseil, Bruce Reece, dans un communiqué.

«Nous restons opposés à toute suppression ou tout affaiblissement du moratoire sur les pétroliers», a-t-il indiqué.

M. Hill a rédigé dans un communiqué que les membres de la Première Nation tirent 60 % ou plus de leur alimentation directement de l'océan et que le risque de déversement est trop important.

Le territoire Gitga'at comprend une grande partie du chenal Douglas, une voie potentielle que les pétroliers pourraient emprunter pour se rendre à Kitimat et en revenir, a indiqué la Première Nation.

Le nettoyage des déversements d'hydrocarbures demeure un mythe, a-t-elle ajouté.

«Notre position n'est pas de nous opposer au développement», a soulevé Art Sterritt, conseiller Gitga'at et ancien directeur général des Premières Nations côtières, dans le communiqué.

«Il s'agit de l'erreur humaine, qui est inévitable, et de l'ampleur du risque, qui ne peut être atténué par les technologies actuelles», a-t-il dit.

M. Sterritt a affirmé que, tant que l'industrie ou les gouvernements ne pourront pas démontrer une méthode viable pour récupérer le bitume du fond marin et du littoral, la menace d'un déversement d'hydrocarbures demeure incompatible avec les responsabilités confiées à la Première Nation.

Dans une entrevue accordée lundi, M. Sawhney a expliqué que les préoccupations soulevées concernant la sécurité seraient soumises à un comité consultatif technique, ajoutant que «la sécurité des pipelines a fait d'énormes progrès».

«Lorsque la demande sera soumise au Bureau des grands projets (du gouvernement fédéral), l’obligation légale de consultation entrera en vigueur», a-t-il expliqué.

«Au moins, nous aurons un point de départ pour entamer cette discussion sur la sécurité maritime et l’ampleur des mesures à prendre», a-t-il rajouté.

Les membres favorables à l'oléoduc souhaitent préserver leur anonymat

Le projet d’oléoduc a suscité une forte opposition, notamment de la part des Premières Nations côtières, qui affirment qu’il ne verra jamais le jour.

Un représentant des Premières Nations côtières sera à Ottawa mardi, lors du vote à la Chambre des communes sur une motion conservatrice demandant aux députés d’appuyer le projet de construction de l’oléoduc.

M. Sawhney a indiqué avoir discuté avec des membres des Premières Nations de la Colombie-Britannique favorables à l’oléoduc, mais s’est engagé à préserver leur anonymat.

«Le contexte politique est pour le moins mouvementé, et il peut être difficile pour les nations qui prennent position en faveur du projet de l’oléoduc, en raison des fortes pressions exercées., a-t-il expliqué. Je respecte et je comprends leur position.»

M. Sawhney a souligné qu'il est important de noter que les Gitga'at affirment ne pas être opposés au développement économique et souhaitent poursuivre le dialogue.

«C'est important, car les positions peuvent évoluer. Nous l'avons constaté par le passé», a-t-il dit.

M. Hill a invité le ministre à venir visiter la communauté afin qu'il puisse observer leur mode de vie.

Il a déclaré ne pas comprendre pourquoi on tenterait de le faire changer d'avis après tout ce qu'il a exposé sur l'importance de la région.

«Nous sommes tous concernés et nous devons nous entraider pour assurer notre réussite», a-t-il décrit.

«Et il est hors de question de me faire croire qu'un déversement de pétrole va améliorer les choses. Cela nous anéantirait complètement, et c'est ce que j'ai ressenti lors de cette rencontre», a-t-il conclu.

Ashley Joannou, La Presse Canadienne