Coupes dans les collèges ontariens après la réduction d'étudiants internationaux

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Par La Presse Canadienne, 2025
TORONTO — Le durcissement du régime canadien d'accueil des étudiants internationaux a des répercussions sur l'ensemble de l'enseignement supérieur, mais les étudiants collégiaux de l'Ontario craignent d'être les plus touchés par les annulations de programmes et les ajustements de services.
Partout dans la province, les collèges ont annoncé la suspension de dizaines de programmes en raison de la baisse du plafond fédéral imposé aux étudiants internationaux, qui paient habituellement des frais de scolarité élevés contribuant au budget des établissements.
Ottawa a récemment annoncé qu'elle délivrerait encore moins de visas d'études internationaux l'an prochain, après avoir instauré ce plafond en 2024, invoquant la nécessité de réduire la population temporaire du Canada. Le gouvernement fédéral a indiqué que le ministère de l'Immigration délivrera jusqu'à 408 000 permis d'études en 2026, contre 437 000 en 2025 et 485 000 en 2024.
Toby Lew, directeur de l'éducation et de l'équité à l'association étudiante du Collège George Brown, a indiqué que les étudiants s'attendent à ce que ces changements affectent leur expérience académique.
«De nombreux étudiants étaient sous le choc de la suppression de certains programmes très populaires auprès des étudiants internationaux, ou financés par des fonds destinés à ces derniers», a-t-il affirmé, ajoutant que sept programmes en hôtellerie très prisés avaient récemment été supprimés.
Parmi les programmes supprimés figurent la gestion de l'alimentation et de la nutrition, la planification d'événements et la gestion hôtelière.
Selon M. Lew, les étudiants canadiens et internationaux sont touchés par ces coupes budgétaires, qui sont une conséquence directe de la décision politique du gouvernement fédéral.
«C'était assez frappant de constater à quel point le plafond affecte directement autant d'étudiants, canadiens et internationaux.»
Il a dit que l'association étudiante fait face à des difficultés financières et adapte ses services, notamment ses programmes d'aide alimentaire, pour compenser la baisse des inscriptions.
«Nous devons revoir notre stratégie quant aux services que nous offrons et à la manière dont nous les fournissons à nos étudiants, et aussi optimiser leur utilisation», a-t-il expliqué.
«Nous collaborons avec le collège afin d'assurer le financement continu de certains de ces services par l'établissement, car l'insécurité alimentaire est un problème grave auquel les étudiants sont confrontés et le collège a la responsabilité de veiller à ce qu'ils aient un accès adéquat à une alimentation nutritive et abordable.»
Le Collège George Brown n'a pas répondu aux questions de La Presse Canadienne.
Des coupes de personnel
Dans plusieurs des 24 collèges publics de l'Ontario, les étudiants ont déjà subi des perturbations de service cet automne en raison d'une grève de près de cinq semaines du personnel de soutien à temps plein.
Certains jours de grève, les cours et les activités en présentiel ont été annulés sur les campus où le personnel en grève tenait des rassemblements, notamment au Collège Mohawk, à Hamilton, et au Collège St. Clair, à Windsor.
Les membres du syndicat représentant les 10 000 employés de soutien ont ratifié une nouvelle convention collective de trois ans en novembre. Le syndicat a indiqué que la sécurité d'emploi était une préoccupation majeure compte tenu des fermetures de campus, des compressions de programmes et des mises à pied dans le secteur collégial.
Alors qu'elle plaidait cet automne pour un investissement fédéral et provincial, Collèges Ontario, qui représente les 24 établissements d'enseignement collégial, a indiqué qu'environ 600 programmes avaient déjà été suspendus et que plus de 8000 postes avaient été supprimés. L'organisme de défense des intérêts des collèges n'a pas répondu aux nombreuses demandes de commentaires supplémentaires.
Le Syndicat des employés de la fonction publique de l'Ontario (SEFPO), qui représente le corps professoral et le personnel de soutien des collèges de l'Ontario, a demandé au gouvernement ontarien d'intervenir après que le Collège Conestoga a diffusé près de 400 avis de licenciement la semaine dernière.
Le syndicat a déclaré que le collège licenciait 181 professeurs à temps plein sur ses campus de Kitchener, Waterloo, Cambridge, Brantford et Guelph, et supprimait également 197 postes de personnel de soutien.
«Nous venons de perdre plus de 20 % de notre corps professoral expérimenté à temps plein juste avant les Fêtes, et la réalité est glaçante: la direction du collège restructure l'effectif pour accentuer la précarité», a soutenu Leopold Koff, président de la section locale du SEFPO qui représente les travailleurs.
«C'est inhumain, c'est de l'antisyndicalisme.»
Le Collège Conestoga n'a pas répondu à une demande de commentaires cette semaine.
Réduction des services aux étudiants
Jerry Thomas, président et directeur général de l'association étudiante du Collège Fanshawe à London, en Ontario, a déclaré que le collège réduisait et restructurait certains services, notamment en fermant le Bureau de l'ombudsman en raison de contraintes budgétaires.
Il a précisé que ce bureau constituait un important organisme impartial pour les étudiants.
«Il offrait un soutien aux étudiants pour toutes leurs préoccupations, qu'elles soient d'ordre scolaire ou non, et les accompagnait du début à la fin afin que leurs besoins soient satisfaits», a expliqué M. Thomas.
«Fanshawe était l'un des rares collèges, voire l'un des deux seuls, en Ontario à disposer d'un tel service sur son campus.»
M. Thomas a ajouté que des coupes avaient également été effectuées dans les ressources en santé mentale sur le campus, notamment une réduction du nombre de conseillers disponibles, et que, selon l'association étudiante, une quarantaine de programmes seraient suspendus d'ici l'an prochain.
Kyle Rooks, porte-parole du Collège Fanshawe, a affirmé qu'il n'y avait eu aucune réduction des services aux étudiants malgré la fermeture du Bureau de l'ombudsman et les propos de M. Thomas selon lesquelles l'offre de services de consultation serait moindre.
«Les étudiants ont toujours accès aux services liés à l'ombudsman par l'entremise de notre bureau de l'équité, de la diversité et de l'inclusion», a-t-il précisé.
«Des changements structurels ont été apportés cet automne aux services de consultation et d'accessibilité afin d'accroître leur efficacité et de réduire les temps d'attente, permettant ainsi à un plus grand nombre d'étudiants d'obtenir le soutien dont ils ont besoin.»
M. Rooks a confirmé que l'établissement prenait des «mesures difficiles, mais nécessaires», notamment la fermeture de programmes, pour faire face à un déficit prévu de 70 millions $ au cours des deux prochaines années. Ce déficit est causé par la baisse des inscriptions d'étudiants internationaux, la stagnation du financement provincial et la hausse des coûts d'exploitation.
«Notre priorité demeure de veiller à ce que tous les étudiants actuellement inscrits aient la possibilité de terminer leurs études avec la même qualité d'enseignement et de soutien qu'ils attendaient lorsqu'ils ont choisi d'étudier à Fanshawe», a-t-il conclu.
Pour M. Thomas, les coupes budgétaires imminentes liées au plafond du nombre d'étudiants internationaux ont semblé être éclipsées cette année par la grève du personnel de soutien.
Il s'inquiète de ce que l'avenir réserve, a-t-il fait valoir.
«Il y a eu beaucoup de changements, mais leurs répercussions ne se feront sentir qu'à partir de l'an prochain.»
Maan Alhmidi, La Presse Canadienne